24H 22.10.18
Volleyball
Cheseaux, 4357 âmes, sa comète et son club de volley
CHANTAL_DERVEY

Tout le village est fier de son équipe de LNA et la soutient. Reportage sur ce petit miracle du volley suisse

Pierre-Alain Schlosser

Les 4357 habitants de Cheseaux ont au moins deux bonnes raisons d’être fiers de leur village. La première est la découverte d’une comète, en 1743, par l’astronome local Jean Philippe Loys de Cheseaux. La deuxième est son club de volley qui milite en LNA féminine.

Traversée par le LEB, la commune située à 8 kilomètres au nord de Lausanne fait corps derrière ses jeunes volleyeuses. «Même quand on perd tous nos matches, il y a un noyau de 300 spectateurs dans les gradins. Nous en avons compté 700 lorsque le club a disputé la Coupe d’Europe, dans les années 90», se souvient Jacques Martin, speaker, photographe du club et ancien membre du comité.

Pas de doute, il se passe quelque chose de spécial dans la salle de Derrière-la-Ville. «Le public est extraordinaire, relève la libero Marine Haemmerli. Samedi, pour notre premier match de championnat, nous avons perdu 3-0 face à Aesch, et pourtant une trentaine de supporters nous ont ovationnées en se tenant debout. Pendant les matches, on les entend, croyez-moi. Dans les moments clés, ils nous portent littéralement.»

Dans les gradins, Lucio Casto, 73 ans, est sans doute le plus bruyant des supporters. Il frappe des mains, pousse des cris de Sioux, hurle le nom du club et des joueuses, tout en actionnant un klaxon à chaque point réussi. «Je vous préviens, je vais faire du bruit, annonce cet ancien boxeur et footballeur au moment de s’installer à côté de nous. D’habitude, il y a quatre jeunes qui frappent sur leur tambour, mais ils sont absents aujourd’hui. Je viens à tous les matches depuis que mes trois petites-filles font partie du club.» Cet Italien de Lecce, arrivé en Suisse à 17 ans, apprécie les efforts du VBC Cheseaux pour la jeunesse. «Pendant qu’ils pratiquent leur sport, ces jeunes ne font pas de bêtises.»

Politique audacieuse

Des paroles qui résonnent dans l’esprit de Georges Favre, ancien syndic de Cheseaux, ex-président du club et fidèle du VBC. «À l’époque, nous nous sommes demandé si notre commune devait apporter son soutien au volley d’élite ou axer ses efforts sur le volley détente. J’ai opté pour la première solution et la Municipalité m’a suivi. Et je suis heureux de constater que c’est toujours le cas. Notre volonté est de soutenir les sociétés locales et leurs jeunes. Certains diront que ça coûte de l’argent. Moi, je prétends que ça coûte moins cher que de les laisser traîner dans la rue et de devoir les récupérer par la suite. Là, les filles s’entraînent quatre ou cinq fois par semaine en plus de leurs études. Elles méritent un tel soutien.»

Cette politique audacieuse n’explique pourtant pas pourquoi l’alchimie opère à Cheseaux depuis plus de trente ans. «Les matches du VBC Cheseaux sont devenus un lieu de rendez-vous pour de nombreuses personnes, estime pour sa part Carsten Pedersen, lui aussi ancien président du club. C’est peut-être étrange à dire, mais le bar de la salle est fabuleux. Il y a un vrai espace propice aux échanges dans cet endroit. À titre personnel, j’y rencontre des gens que je ne vois qu’ici. Si bien qu’à la fin du championnat on se demande ce que l’on fera durant l’été.»

Également ex-président du club de Sugnens, Carsten Pedersen se souvient que son village avait organisé un car pour voir Cheseaux en finale de la Coupe de Suisse, au début des années 90. «Le VBC Cheseaux fédère car il compte des joueuses de la région qui attirent leurs amis et leurs parents. Idem pour la centaine de sponsors petits et grands qui s’identifient à l’esprit positif du club», explique-t-il.

Même avec des résultats incomparables à ceux du LUC, la mayonnaise prend et le nombre de spectateurs est souvent plus élevé qu’à Dorigny. «Nous avons réussi à créer une identité au sein du club, affirme Doris Stierli Haemmerli, âme et architecte du VBC Cheseaux. Après nos relégations volontaires en LNB, nous sommes repartis avec des jeunes joueuses du cru. Car l’élite n’est que la pointe de l’iceberg. Ça fait dix ans que nos juniors remportent des titres cantonaux dans toutes les catégories et s’illustrent sur le plan national.»

Une touche féminine

Et l’assistante du coach finlandais Teemu Oksanen de laisser la passion s’exprimer. «J’ai commencé ma carrière comme prof de sport à Cheseaux en 1975. Et ça fait quarante-trois ans qu’on pratique le volley dans la commune. D’anciens élèves sont devenus membres du club des supporters. Certains se déplacent quand nous jouons à l’extérieur. Il faut dire que le volley est magique. Nous avons envie de réussir quelque chose au niveau de la technique et de la beauté du jeu. Les gens de la région sont ravis d’avoir une équipe féminine dans l’élite. Le LS, le LHC et le LUC brillent, mais ce sont tous des clubs masculins.» L’esprit du VBC Cheseaux fait un bien fou au sport d’élite suisse.

Dimanche
Kanti Schaffhouse – Cheseaux 3-0